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Les modes d’accueil adaptés aux mineurs non accompagnés : Face à l’urgence, des départements innovent

Les profils des mineurs non accompagnés (MNA) diffèrent de ceux des autres enfants accueillis en protection de l’enfance et appellent ainsi une prise en charge spécifique. Dans ce contexte, comment les Départements prennent en charge ce public ? Quelle proportion d’entre eux développent des modes d’accueil dédiés ? Quels modes d’accueil et quel accompagnement proposent-ils ? Comment facilitent-ils leur intégration et leur insertion socio-professionnelle ? Et à quel coût ? C’est pour répondre à ces interrogations que l’Odas a lancé en 2017 une enquête auprès de l’ensemble des départements métropolitains, afin de recenser les modes d’accueil proposant un accompagnement spécifique et adapté.

La demande migratoire accrue depuis quelques années inquiète l’opinion et les pouvoirs publics. Le sort en particulier des plus jeunes, enfants et adolescents, ne peut pas laisser indifférent. Parmi eux, certains (principalement des adolescents) ne sont pas accompagnés par leurs familles, et leur accueil incombe donc juridiquement aux services d’aide sociale à l’enfance. C’est donc auprès des départements que l’Odas a mené entre 2016 et 2017 une enquête pour mieux comprendre les problématiques et les réponses apportées à ces mineurs non accompagnés (MNA). Il ressort que ces populations nouvelles sont bien différentes des jeunes dont ces services s’occupent habituellement et les aides offertes doivent donc s’adapter. Là où les jeunes Français accueillis par l’ASE sont marqués par l’instabilité ou la violence familiale, et par des difficultés éducatives et sociales, les mineurs non accompagnés étrangers souffrent en général de traumatismes dus à leur parcours migratoire voire de la situation antérieure (guerre, insécurité, pauvreté…) auquel s’joute le décalage linguistique et culturel. Beaucoup parmi eux ont le désir de s’en sortir, de devenir autonomes, de saisir les chances.

L’accueil par l’ASE recouvre à la fois les mesures de protection, l’hébergement, et l’accompagnement juridique et éducatif. Si l’hébergement commence la plupart du temps en établissements collectifs, les départements essaient rapidement d’orienter les MNA vers des logements plus autonomes, correspondant mieux au désir et à la capacité d’indépendance de ces jeunes, surtout ceux qui sont plus proches de la majorité. Il s’agit principalement d’appartements partagés, avec l’encadrement de travailleurs sociaux du département. Les appartements partagés sont en général des appartements loués dans le parc privé, dispersés sur le territoire communal, et peuvent recevoir de deux à quatre jeunes. Le coût de ces appartements et de l’accompagnement social indispensable des MNA est moindre qu’en hébergement collectif. L’intégration dans la vie du quartier est d’autant plus efficace que les communes ou les associations locales aident à la préparer avec les autres habitants. Les cas difficiles, mais aussi les plus jeunes et les filles, peu nombreuses, restent majoritairement en hébergement collectif. Plusieurs départements essaient aussi de développer l’accueil au sein de familles ordinaires, aidés en cela par la mobilisation d’associations. En effet, la médiatisation de la crise migratoire a déclenché un mouvement de solidarité et des familles se sont manifestées pour accueillir bénévolement les MNA. Ceci présente des intérêts multiples, dont une bien meilleure intégration dans la société, mais aussi un coût bien inférieur. Cette bonne volonté n’est toutefois pas encore généralisée et il s’agit d’accueils encore très minoritaires.

Pour l’accompagnement social et éducatif, les départements sont encore en première ligne, et tentent d’assouplir des partenariats encore difficiles, en particulier avec les préfectures et l’éducation nationale. L’enquête de l’Odas a permis d’identifier des structures qui ont bâti de façon innovante cette activité d’accompagnement (voir le rapport). En ce qui concerne la scolarisation, les MNA sont également pris en charge par le CASNAV (centre académique pour la scolarisation des enfants allophones nouvellement arrivés et des enfants issus de familles de voyageurs) et par le système scolaire public, qui a considérablement renforcé les filières spécifiques d’accès à la scolarité. La formation et l’insertion professionnelle demeure un sujet crucial pour chaque MNA, car c’est elle qui détermine s’il pourra ou non avoir un titre de séjour lors de sa majorité, ainsi que toutes les aides et droits en découlant. Ainsi les jeunes majeurs étrangers doivent justifier d’une formation professionnelle d’au moins six mois. C’est là où le partenariat entre le département et l’Education nationale fonctionne le mieux, que les parcours de formation sont les plus complets, intégrant un socle linguistique et général, des formations qualifiantes, mais aussi un accompagnement à la recherche d’un premier emploi. Ceci provoque une assez forte disparité des chances des MNA selon les territoires. Car une fois majeurs, leur prise en charge se complique de l’obtention ou non du droit de séjour, et à moins d’une construction de l’insertion professionnelle bien construite en amont, la situation de ces jeunes devient à nouveau très fragile.

En conclusion, la nécessité de faire face à une demande nouvelle d’accueil et d’accompagnement des MNA a conduit les départements à réfléchir à des solutions alternatives. C’est bien l’émergence d’un nouveau besoin qui ouvre la voie à une protection de l’enfance plus développée, plus diversifiée, plus adaptée.

> Télécharger la Lettre de l’Odas - « Les modes d’accueil adaptés aux mineurs non accompagnés : Face à l’urgence, des départements innovent »