Enquête « Décentralisation et protection de l’enfance : Où en est-on ? »
Afin d’objectiver l’action des départements dans le champ de la protection de l’enfance, l’Odas a été sollicité par l’Assemblée des Départements de France (ADF) . A travers l’analyse des actions menées par les Départements avec leurs partenaires dans l’exercice de leur compétence d’ASE, cette étude dresse le bilan de la politique de protection de l’enfance menée pendant plus de trente ans par les départements, afin de mieux circonscrire ses réussites, ses difficultés et ses perspectives.
Le sujet de la protection de l’enfance a été particulièrement présent dans l’espace public ces dernières années que cela soit sous l’angle politique[1], médiatique[2] et même culturel[3]. Depuis la réforme de la décentralisation initiée par les lois Defferre[4], les départements exercent cette compétence. Elle concerne directement les trois services dont le département est responsable et assure le financement : le service de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) bien sûr, mais également le service de la Protection Maternelle Infantile (PMI) et le Service Départemental d’Action Sociale (SDAS). Jusqu’à aujourd’hui, les législations successives ont confirmé et précisé la responsabilité prépondérante du Président du Conseil départemental en matière de protection de l’enfance.
Parmi toutes les compétences qui ont été transférées aux départements, la protection de l’enfance occupe une place particulière. En effet, elle intervient sur un sujet hautement sensible : les enfants et leur devenir. Pour parvenir à une approche réellement globale des familles, elle nécessite d’animer une large transversalité et d’impliquer une très grande diversité d’acteurs : les départements bien sûr, l’État dans ses différentes composantes avec notamment le rôle central de la justice et une place particulière pour l’Éducation nationale mais également les villes qui disposent de multiples leviers pour accompagner les parents dans leurs responsabilités vis-à-vis des enfants, les organismes de protection sociale et les associations. Sans omettre que depuis trente-six ans la question de la place des parents et la prise en compte des besoins de l’enfant ont fait l’objet de plusieurs lois[5].
De la prévenance[6] à la protection, le département pilote l’ensemble des aspects de cette politique par l’action de ses services (SDAS, PMI et ASE), par les recherches d’améliorations, voire le soutien aux innovations en lien étroit avec les autorités judiciaires.
Le caractère stratégique de cette compétence a conduit l’Assemblée des Départements de France (ADF) à solliciter l’Odas afin d’objectiver l’action des départements dans le champ de la protection de l’enfance. Cette mission a pour ambition de dresser le bilan de l’exercice de cette compétence départementale afin de mieux circonscrire ses réussites, ses difficultés et ses perspectives.
A cette fin, l’Odas a réalisé une enquête comportant une cinquantaine de questions portant sur différents aspects de la protection de l’enfance (la prévention, l’information préoccupante, les modalités de prise en charge, l’observation, les pratiques et initiatives innovantes). Ce questionnaire n’est, bien entendu, pas exhaustif car l’Odas dispose d’informations du fait de ses nombreux travaux sur le sujet et de ses multiples rencontres avec les acteurs concernés. L’essentiel du questionnaire est composé de questions fermées mais quelques-unes appelaient à un commentaire sur les sujets suivants : les référentiels, les dispositifs innovants en matière de prévention et de protection ainsi que les nouvelles modalités de collaborations avec les familles. Le projet de questionnaire a été construit en s’appuyant sur une large concertation qui s’est achevée par un échange avec l’ADF. Ce projet a ensuite été testé avec deux départements afin de vérifier la bonne compréhension des questions. La version définitive du questionnaire a été adressée par mail à l’ensemble des Présidents de Conseils départementaux, des Directions Générales Adjointes à la solidarité et des Directions Enfance-Famille au mois d’août 2020. Suites aux différentes relances, 88 départements ont fait parvenir leur réponse à l'automne 2020.
Une exploitation des réponses a conduit à la production d’un rapport préliminaire, remis à l’ADF fin décembre 2020. Compte tenu de son caractère inachevé, il n’a pas été rendu public. En effet, il s’agit d’une première analyse des résultats du questionnaire. Cette analyse doit être consolidée notamment par une exploitation des réponses aux questions ouvertes concernant les référentiels, les dispositifs innovants en matière de prévention et de protection ainsi que les nouvelles modalités de collaborations avec les familles.
Les résultats de ce questionnaire seront aussi confrontés aux informations dont disposent l’Odas depuis 30 ans du fait de ses nombreux travaux sur le sujet. C’est pourquoi, ces travaux devraient contribuer à l’écriture d’un véritable bilan de la politique de protection de l’enfance menée depuis la décentralisation par les Départements et qui devrait être rendu public en fin d’année 2021.
[1] Stratégie nationale de soutien à la parentalité pour la période 2018-2022 ; Stratégie nationale de la prévention et de la lutte contre la pauvreté (2020) ; Stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance 2020-2022 ; Programme « cités éducatives » initié depuis 2019 par l’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires (ANCT) en partenariat avec le Ministère de l’Education Nationale et de la Jeunesse (MENJ – DGESCO).
[2] En témoignent les nombreux documentaires télévisuels et radiophoniques de ces trois dernières années comme « les défaillances de l’Aide sociale à l’enfance » de Zone interdite ou encore, « Enfants placés : les sacrifiées de la république » de Pièces à conviction.
[3] En référence aux films « Jusqu’à la garde » de Xavier Legrand (2017), « Pupille » de Jeanne Herry (2018), « Les Chatouilles » d’Andréa Bescond (2018).
[4] Loi n°82-213 du 02 mars 1982 – Loi n°83-8 du 7 janvier 1983 – Loi n°83-663 du 22 juillet 1983.
[5] Loi n° 84-422 du 6 juin 1984 – Loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 – Loi n° 2016-297 du 14 mars 2016.
[6] Aussi appelée co-veillance, le terme « prévenance » vient du Québec. Dépassant la notion de prévention, ce concept renvoie au fait, « d’être attentif aux besoins de chacun et de faire à plusieurs, dans une logique collective et une dynamique de lien social » (Jean EPSTEIN, 2006).