Aller au contenu principal
Décryptage/Témoignage

Jacques Chirac : la fraternité en étendard

A la suite de l’Appel à la fraternité lancé par l’Odas en 1999, de nombreux acteurs locaux ont fait part de leurs initiatives pour défendre cette valeur. Ils étaient conviés le 7 avril 2000 par Jacques Chirac, alors Président de la République, pour les remercier. A cette occasion celui-ci prononçait un discours dans lequel il faisait part de son adhésion à l’Appel à la Fraternité, valeur qu’il érigera en Grand cause nationale en 2004, animée par Jean-Louis Sanchez, délégué général de l’Odas. Suite à la disparition de l’ancien Président de la République, nous avons souhaité publier quelques extraits de ce discours.

Jacques Chirac

Discours de monsieur Jacques Chirac, Président de la République, lors de la réception en l'honneur des initiatives "Fraternité 2000" (Palais de l’Elysée - Vendredi 7 avril 2000).
 

Madame la ministre,
Mesdames et messieurs,

Des trois vertus inscrites dans la devise de notre République, l’usage veut que la fraternité soit citée en dernier, mais elle n’est certes pas la moins importante et les Français lui sont particulièrement attachés. Ils l’ont en effet toujours pratiquée, notamment dans les moments difficiles, et encore récemment face aux tempêtes et à la marée noire.

Aujourd’hui, il est plus fréquemment question de solidarité, solidarité qui est assurément une valeur forte. Mais souvent, c’est la fraternité qui l’inspire. L’une et l’autre ne sont pas toutefois synonymes.

La solidarité est le principe cardinal de notre protection sociale. Nos systèmes de sécurité sociale, nos systèmes de transferts sociaux et nos mécanismes de redistribution fiscale ont été bâtis sur le principe de la solidarité. Sur elle, reposent en grande partie les droits sociaux inscrits dans le préambule de notre Constitution. Organisée au plan national, elle doit souvent prendre des formes administratives. C’est inévitable, en raison même de l’importance des dispositifs que nous avons su mettre en place pour garantir matériellement la cohésion de notre société.

La fraternité, quant à elle, est toujours fondée sur une relation de personne à personne. C’est une solidarité à taille humaine, une solidarité qui s’incarne. Un humanisme qui prend le visage d’hommes et de femmes allant aux devants des difficultés et des peines d’autres hommes et d’autres femmes. Un altruisme qui vient du sentiment autant que de la générosité.

La fraternité, c’est aussi l’enrichissement du don, la joie d’aller vers les autres et le plaisir d’être ensemble.
L’appel lancé l’an dernier pour que l’année 2000 soit consacrée « année de la fraternité » est un appel qui sonne juste. Il est en harmonie avec les besoins et les attentes de notre société. Il invite à réagir face aux risques d’une régression du lien social en redonnant sens au troisième pilier de la République.
Selon les termes mêmes de cet appel, si la fraternité ne peut être « la seule affaire des concitoyens », elle n’est pas non plus « la seule affaire du droit » et de l’État, car en réalité elle est « l’affaire de tous ».

Cet appel, Mesdames et Messieurs, je le fais également, tout à fait mien. C’est un retour aux sources de l’esprit républicain. Naturellement, il n’incite pas à revenir aussi à la société d’autrefois. Il s’inscrit bien dans la modernité.
[...] 

Madame la ministre,
Mesdames et messieurs,

La fraternité, c’est l’écoute, l’entraide et le respect. C’est la reconnaissance de l’égale dignité de chacun et l’accès effectif des personnes en difficulté aux droits de tous. C’est une solidarité qui préfère la responsabilité à l’assistance. C’est aussi la mise en œuvre de véritables pactes locaux liant élus, associations et entreprises.

Les citoyens peuvent agir efficacement au service de cette fraternité. Ils sont prêts à le faire pourvu qu’un environnement favorable leur soit proposé. Votre apport à la société n’est pas seulement de venir en aide, comme vous le faites, aux plus démunis mais, aussi, un trait d’union entre les hommes, ceux qui veulent agir, sans savoir bien comment, et ceux qui ont besoin de leur aide.

De votre engagement pour la fraternité, je tenais aujourd’hui à vous rendre témoignage au nom de la République et à vous en remercier comme je remercie toutes celles et tous ceux qui absents, aujourd’hui, pour des raisons matérielles partagent votre idéal et votre engagement
Je vous remercie.