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L’Odas accompagne la territorialisation de l’action sociale du Département des Pyrénées-Atlantiques

Alors que la Loi NOTRe implique une reconfiguration des missions et des organisations des Départements, le contexte financier de plus en plus contraint appelle des réponses à court terme. Mais cette nécessité se heurte à une augmentation de la demande sociale. L’issue pour articuler ces deux réalités contradictoires est sans doute dans une recherche d’adaptation de la réponse, voire le développement d’une nouvelle conception de l’action publique, fondés sur des logiques de développement social1. C’est en ce sens que le Département des Pyrénées-Atlantiques, qui s’est engagé dans la refonte de son projet départemental, a sollicité l’Odas pour l’accompagner plus particulièrement dans la refonte de l’action sociale. Avec un enjeu affiché : « ne pas dissocier la dynamique organisationnelle de la dynamique de fond et du sens donné à l’action sociale pour l’ensemble de ses acteurs : Elus, Directions, Agents et Usagers ». Entretien avec Martial Dardelin et Jean-Claude Placiard, conseillers de l’Odas, en charge de ce travail.

Pouvez-vous nous présenter cette étude ?

Martial Dardelin : L’Odas a réalisé de nombreux travaux d’observation dans le domaine des stratégies et organisations sociales des Départements. La dernière en date intitulée « Territorialisation et cohésion sociale », conduite de 2012 à 2015 avec 18 Départements, a largement alimenté notre rapport « Développement social : les départements à l’épreuve du réel », publié fin 2016. C’est au regard de cette expertise que le Département des Pyrénées Atlantiques a sollicité l’Odas au printemps 2016 pour l’accompagner dans la refonte de son action sociale dans le cadre de la refonte de son projet départemental.
La première phase, de réflexion, visait à construire la future territorialisation du Département à travers l’apport de connaissances, l’échange de pratiques et un travail collaboratif mené avec les professionnels et les élus autour des valeurs et de la conception du travail social.

Jean-Claude Placiard : Un point essentiel de ce travail c’est qu’on n’aborde pas l’organisation pour l’organisation. En effet, le département a profité de la recomposition des territoires pour leur redonner du sens avec deux objectifs : renforcer la proximité et améliorer la qualité du service rendu à l’usager. Il y a une forte volonté politique d’assumer les responsabilités par rapport à la loi NOTRe, et surtout de demander aux agents de participer aux réflexions stratégiques autour de cette responsabilité. C’est pourquoi ce travail s’est fait non seulement avec les élus, mais surtout avec une mobilisation extraordinaire des agents, qui ont été plus de 120 à prendre part à la démarche, portés par un objectif commun : comment simplifier le parcours de l’usager et, par la même, les façons de faire ?

Martial Dardelin : Suite à ce travail de construction commune autour du sens, au printemps 2017 la recherche action est entrée dans sa seconde phase opérationnelle : la mise en œuvre de la territorialisation avec la déclinaison des projets de territoire. La question désormais c’est bien : comment concrétiser dans l’action cette réflexion sur la transformation des pratiques qui donne de la place au collectif et ne se réduise pas à l’action collective ?
Après avoir travaillé sur le sens du travail social, nous avons ainsi revisité, à travers différents groupes de travail, « les procédures et leur simplification », « l’organisation des unités territoriales et des directions de siège », « l’appropriation du nouveau modèle et sa transmission aux équipes », « diagnostic et projet de territoire ».

Jean-Claude Placiard : Pour cette phase, comme pour la première, nous appliquons le principe du « faire avec » et non pas de « faire à la place ». Notre rôle consiste surtout en un appui méthodologique. Nous accompagnons la construction collective des méthodes, des outils…, pour dégager le véritable projet de territoire. Au delà, nous insistons beaucoup sur l’idée que ce travail n’a de sens que si on construit un projet partagé avec les politiques et les différents professionnels des territoires, mais aussi avec les partenaires, les habitants et usagers.

Le « faire avec » est l’un des principes chers à l’Odas. Quel est selon vous l’apport de l’expertise de l’Odas dans un travail tel que celui-ci ?

Martial Dardelin : Comme dans chacun de nos travaux, nous appliquons les deux grands principes de l’Odas : le partage de l’observation et de la réflexion ; l’observation au service de l’action. Ainsi par exemple, nous avons démontré comment, à partir de l’analyse des données brutes fournies par l’observatoire départemental (particulièrement outillé et très riche), on produit un projet de territoire qui fait sens. Nous avons aidé à identifier parmi toutes ces données celles sur lesquelles l’action du département et des territoires pouvait avoir une influence.

Jean-Claude Placiard : Nous avons également été très attentifs à l’engagement des équipes d’encadrement tout en privilégiant la recherche de consensus pour améliorer les réponses des territoires. Ainsi, nous avons construit collectivement, avec l’encadrement, le discours porté auprès des équipes des sept territoires.
Nous avons également beaucoup travaillé sur les potentialités des territoires. Sur l’idée d’appréhender chaque territoire non pas par le prisme de ses carences, mais par celui de ses ressources. C’est une approche un peu nouvelle pour de nombreux professionnels et une façon de se poser les questions autrement et donc de réinterroger leurs pratiques.

Groupes de travail à Bayonne

 

Quels sont, selon vous, les critères de réussite d’une recherche-action de ce type ?

Jean-Claude Placiard : Il y en a plusieurs. D’abord, l’engagement des élus et de la direction générale. Cela a permis d’avoir, au sein du Département, une véritable équipe de projet (portée par la direction des territoires et l’observatoire départemental) qui fait l’interface entre l’administration du Département et l’Odas. Ensuite, il faut du temps pour motiver les équipes et leur permettre d’adhérer au projet, c’est capital. C’est la raison pour laquelle cette recherche action se déroule sur plusieurs années. Il faut également une participation réelle des professionnels de terrain : il est donc important de les impliquer dès l’amont. Enfin, il est également essentiel de soutenir les équipes. C’est pourquoi nous avons, par exemple, engagé avec les équipes de direction des territoires la réalisation d’outils d’aide à la conduite de projets ou d’aide à l’animation de réunion spécifique pour présenter leur projet social de territoire, mais toujours à partir de leurs besoins et de leurs interrogations et en construisant les documents ensemble.

En quoi ce travail permet-il d’ouvrir de nouvelles pistes et de renforcer l’expertise de l’Odas ?

Martial Dardelin : Pour l’Odas, il est capital de pouvoir accompagner ce type de démarches car il en découle vraiment de l’enrichissement mutuel qui irrigue l’ensemble de nos travaux. Alors que la recherche action précédente posait des constats et des préconisations pour une territorialisation stratégique, ce travail est l’occasion de montrer qu’il est possible de construire une territorialisation qui prenne tout son sens dans la réalité des territoires de l’intervention sociale et médico-sociale, dans une approche transversale et multidimensionnelle, donnant du sens au concept de proximité tant de fois décliné sur le mode d’une assertion ou d’un slogan.

Jean-Claude Placiard : Et cela, tout en tenant compte des contraintes. Nous ne sommes pas dans l’utopie, nous partons des réalités de terrain. Nous avons également fait passer le message que c’est aux professionnels, élus, partenaires et habitants de décider ce qu’ils veulent construire pour leur avenir commun. Malgré le contexte financier, il n’y a pas déterminisme, ils ont le pouvoir d’agir et de contribuer à l’avenir de leur territoire. L’idée est vraiment : avec ce que l’on a, comment peut-on faire mieux pour mieux vivre ensemble ?